Le cancer, un fléau pas si indomptable
A l'occasion de la journée mondiale contre le cancer le 4 février 2010, les spécialistes appellent à améliorer notre qualité de vie, et à ne pas négliger certaines infections. Des réflexes simples à adopter, qui préviennent bien plus que l'on ne le pense de cette maladie qui tue près de 8 millions de personnes par an.
Prévenir le cancer, c'est possible Tel est le thème de la journée mondiale contre le cancer co-organisée ce jeudi par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l'Union internationale contre le Cancer (UICC), et donc le message qu’elles veulent faire passer en priorité.
Car sur les 12 millions de nouveaux cas recensés dans le monde, 40% peuvent être évités, selon l’UICC. Comment ? En améliorant tout simplement sa qualité de vie. Une solution qui paraît si accessible, et pourtant.
La cigarette, l’alcool, le soleil…Dans le détail, 30% des cancers sont dus au tabac.
Le professeur David Khayat, chef du service oncologie de la Pitié-Salpêtrière et ancien président de l'Institut national du cancer, a appelé jeudi dernier sur Europe 1 à «éliminer les grandes causes de cancer», à commencer par ce fléau qu’est le tabac.
«Partout où il passe peut provoquer des cancers», a-t-il mis en garde.
Et de lister tous les organes mis en danger par la cigarette : «quand vous inhalez la fumée, elle va passer dans la bouche, puis le larynx, puis les poumons, et à la fois vous en avalez un peu, donc elle va passer dans l’estomac, dans l’œsophage, (…) près du pancréas, puis ensuite ça passe dans le sang, puis dans les reins, dans la vessie avant d’être éliminée dans l’urine. Et donc vous avez là la liste des cancers» auxquels les fumeurs s’exposent. Effrayant.
Sur la liste noire des cancérologues figure également l’alcool.Mais David Khayat a quelque peu relativisé le problème en soulignant qu’il s’agissait d’être «raisonnable», c'est-à-dire d’«éviter l’abus et non pas d’éviter de boire du vin».
"Il a été prouvé par le Haut conseil de santé publique que l’idée selon laquelle le premier verre était cancérigène est complètement fausse", a-t-il précisé.
Le soleil est aussi un des facteurs de risques principaux Il peut provoquer un mélanome malin, ce «cancer si grave de la peau, qui voit sa fréquence doubler tous les dix ans». Enfin, s’alimenter sainement et pratiquer une activité physique régulière sont autant de conseils si évidents qu’efficaces, qui pourraient faire chuter le nombre de cancer de près de… 5 millions de cas par an.
Des virus qui dégénèrent en cancerPar ailleurs, 20% des cancers diagnostiqués chaque année sont dus à une infection -virale ou bactérienne- qui a dégénéré.
Ainsi le papillomavirus non traité à temps peut provoquer un cancer du col de l'utérus, les hépatites B et C peuvent causer un cancer du foie, ou encore le virus Epstein-Barr, responsable de la mononucléose infectieuse, peut conduire au lymphome de Burkitt, l'helicobacter pylori, une bactérie en lien avec le cancer de l'estomac...
L'UICC appelle de fait les autorités sanitaires à sensibiliser les populations à l'importance des vaccins.
La prévention et la sensibilisation de l’opinion à ce fléau mondial qu’est le cancer, et aux solutions simples qui existent pour lutter contre, sont en effet les deux principaux chevaux de batailles des spécialistes. «Le cancer tue plus à lui tout seul dans le monde que le sida, plus le paludisme et plus la tuberculose réunis, (…)
Un homme sur deux va avoir un cancer dans sa vie en France, une femme sur trois. "C’est considérable", insiste David Khayat.
«A partir du moment où on a pris conscience de ces chiffres, on peut changer un certain nombre d’habitudes.»
Un cancéreux sur deux guéritPas moins de 7,6 millions de personnes meurent chaque année d’un cancer.
Et le plus effrayant est que ce chiffre est en augmentation.
Selon l’OMS, le nombre de décès devrait passer de 7,9 millions en 2007 à 11,5 millions en 2030, soit une hausse de 45%, due en partie à une population mondiale toujours plus nombreuse et vieillissante.
Sans surprise, les pays en voie de développement sont les plus touchés par ces statistiques, faute de moyens pour prévenir, dépister et soigner, justement. Ils comptent à eux seuls plus de la moitié des nouveaux cas de cancer et plus de 60% des décès dû à cette maladie.
Pour finir sur une note positive, le professeur a également insisté sur le fait que les cancers se soignaient de mieux en mieux, et qu’avec les moyens dont dispose la sciences aujourd’hui, ils étaient nettement plus faciles à supporter.
Un malade sur deux guérit aujourd’hui du cancer, et plus de huit enfants sur dix.
Certains cancers comme celui du sein donnent encore de meilleurs résultats.
- 85% des femmes bien traitées d’un cancer du sein vont guérir en 2012,
- comme 75% des cancers du colon,
- et la même proportion des cancers de la prostate …
Les plus difficiles à soigner restent ceux du pancréas, et les tumeurs au cerveau. Le traitement du cancer du poumon commence pour sa part à donner des résultats.
«Il faut croire à la guérison»Quant à ceux qui n’en guérissent pas, qu’ils se rassurent : «c’est important de le rappeler, ils vont vivre beaucoup plus longtemps que par le passé et avec une qualité de vie bien meilleure», a souligné le professeur Khayat, ajoutant qu’ils se battaient «sur tous les fronts».
«Des vaccins préventifs et thérapeutiques du cancer se préparent» notamment.
L’oncologue a enfin plaidé de tout son cœur en faveur de l’espoir, vital, et légitime, pour les malades.
«Il faut oser parler de guérison aux malades pour les soulager de ce fardeau qui va sinon leur gâcher cette vie que nous leur avons donnée grâce au traitement», a-t-il lancé.
«Il faut y croire, la guérison est légitime dans bien des cancers, et définitive –et non pas simplement un moment d’amélioration.
Pour beaucoup de malades, la guérison n’est plus simplement un rêve, mais une réalité», a-t-il martelé.
Entretien réalisé par Marie Desnos